On présente souvent la Shahâdat, le témoignage de foi de l’islam, comme une simple déclaration : « Il n’y a de divinité que Allâh et Mohammed est son Prophète ». Mais elle est en réalité beaucoup plus, car la fonction de témoin, à laquelle la croyante et le croyant sont appelés, fait référence au grand thème de la vision : témoigner c’est attester de ce que l’on a vu, de ce que l’on a contemplé, et ainsi l’islam se déploie comme une spiritualité de la vision, du regard, de l’œil du cœur (‘ayn al qalb) qui contemple ce que l’œil sensible ne voit pas. Qu’est-ce donc qui est appelé à se découvrir, en islam, à travers la contemplation ?
La prière n’est ni mécanique ni dogmatique, elle se vit comme un chemin initiatique quotidien : au fil de sa gestuelle en quatre temps (station debout, inclinaison, prosternation, station assise), le corps et l’âme se trouvent engagés ensemble dans l’histoire symbolique et initiatique d’un face-à-face entre le divin et l’humain. La prière peut culminer dans une rencontre, une union mystique qui est présence de l’infini dans le fini. Et si, finalement, la prière avait pour vocation de nous faire découvrir que les mystères du divin et de l’humain ne font qu’un ?
On réduit souvent l’aumône (la Zakât) à un impôt social alors qu’elle nous invite à être pensée bien plus largement comme la présence en islam d’un don infiniment plus large, qui va de l’hospitalité à l’entraide, de la fraternité au dévouement, et d’un sens du don infiniment plus profond aussi : dès lors, en effet, que Allâh est le « Donateur suprême » (Al Wahhâb), qui donne quand je donne ? N’est-ce pas la générosité même de la vie, la puissance créatrice de l’univers qui ouvre sa main à travers la mienne ?
Jeûner, oui, mais de quoi ? Il y a presque mille ans déjà, l’Imâm Al Ghazâlî répondait en présentant les « secrets du jeûne » (asrâr as-sawm) du mois de Ramadan d’une manière pour le moins surprenante : le plus important, écrivait-il, n’est pas tant de s’abstenir de boire, de manger, d’avoir des relations sexuelles, du lever au coucher du soleil mais « d’orienter intimement son aspiration vers Allâh puissant et majestueux et de s’éloigner de tout ce qui est autre que lui – Gloire à lui » (Al Ghazâlî). Ainsi le mois du jeûne serait-il le mois du retour à l’essentiel, de la consécration de soi à la vie spirituelle à travers cette « aspiration » dont nous parle Al Ghazâlî. Mais comment incarner cela dans nos vies contemporaines, où le spirituel peine tant à trouver sa place ?
La Mecque est un lieu physique mais aussi un lieu symbolique, un lieu magique, quelque part dans l’imaginaire, au-delà de l’espace et du temps. Où est donc notre Mecque intérieure ? Où est la Ka‘ba du cœur ? Telles sont les questions que se sont posées avant nous celles et ceux qui se souciaient de faire de leur pèlerinage, non pas seulement un voyage en Terre Sainte, mais bien plus essentiellement un itinéraire intérieur et une initiation. Une circumambulation (tawâf) non pas tant autour de la Pierre Noire physique qu’autour de la pierre noire de leur propre conscience que la vie spirituelle va polir jusqu’à la faire redevenir blanche, accueillante et transparente à la lumière divine… L’islam, voie d’éveil, n’est-il pas avant tout un pèlerinage au centre de notre être ?
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